Le contrat de travail se distingue des autres contrats par le fait qu’il y a un déséquilibre entre les parties, inhérent au lien de subordination qui caractérise cette relation.
Toutefois, et malgré cette particularité, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun et doit être exécuté de bonne foi (article L 1221-1 du Code du travail), de sorte que l’employeur (et le salarié du reste) se doit de respecter les obligations nées de la relation de travail.
Reste à examiner la nature de ces obligations (1) et l’attitude à adopter si l’employeur ne les respecte pas (2).
Quelles sont les obligations de l’employeur ?
Si l’employeur est libre de changer les conditions de travail de ses salariés, il ne l’est pas en revanche lorsqu’il s’agit de modifier soit des éléments fondamentaux de la relation de travail (1.1), soit des éléments mineurs mais qui ont été formalisés dans le contrat de travail (1.2).
Les éléments fondamentaux de la relation de travail
L’employeur est débiteur de plusieurs obligations, qu’elles soient ou non formalisées dans un contrat :
– La fourniture de travail, l’employeur devant fournir au salarié les outils, matériaux, bureaux, nécessaires à l’exécution de sa prestation de travail.
– La contrepartie du travail fourni, c’est-à-dire une rémunération s’entendant des salaires et autres avantages payés au salarié (C. trav., art. L. 3221-3).
– Le respect du salaire minimum légal (le SMIC).
– Le respect du principe d’égalité dans la rémunération et l’interdiction de toute forme de discrimination (C. trav., art. L. 1132-1) en fonction notamment de l’âge, de la nationalité, de l’activité syndicale ou du sexe (C. trav., art. L. 3221-2) pour rendre effective l’application de ce principe « à travail égal, salaire égal ».
– L’interdiction des sanctions pécuniaires directes (C. trav., art. L. 1331-2).
– L’obligation de sécurité en matière de protection de la santé au travail : l’article L. 4121-2 impose à l’employeur des actions de prévention des risques professionnels et l’article L. 4141-2 des actions d’information et de formation.
– L’obligation de respecter à la fois la durée légale de travail fixée à trente-cinq heures avec paiement majoré des heures supplémentaires, un cadre impératif en matière de durée journalière (10 heures, C. trav., art. L. 3121-34), hebdomadaire (48 heures sur une semaine mais 44 heures en moyenne sur 12 semaines consécutives, C. trav., art. L. 3121-36) et annuelle (modulation, C. trav., art. L. 3122-4 s.) de travail.
Les éléments formalisés dans le contrat de travail
La force obligatoire du contrat tirée de l’article 1103 du Code civil l’emporte sur le pouvoir de direction et de gestion de l’employeur.
Toute modification du contrat de travail implique le consentement du salarié et son refus n’est pas fautif.
Prenons des exemples très concrets tirés de la jurisprudence pour appréhender ce principe ; relèvent ainsi de la sphère contractuelle non modifiable sans accord :
– la rémunération ;
– le retrait d’un véhicule de fonction qui se traduit par une suppression de primes liées à l’activité commerciale exercée ;
– le changement du lieu de travail dans un autre secteur géographique ;
– la mise en œuvre d’une clause de mobilité qui se traduit par un partage du temps de travail entre plusieurs établissements ;
– la remise en cause du travail à domicile contractuellement prévu ;
– la volonté de l’employeur d’ajouter au contrat de travail une clause d’exclusivité ;
– l’appauvrissement des missions et responsabilités ;
– le passage d’un horaire continu à un horaire discontinu, d’un horaire de nuit à un horaire de jour, d’un temps complet à un mi-temps ou encore la baisse du temps de travail et de la rémunération en découlant.
Si le salarié refuse ces modifications, soit l’employeur renonce à son projet, soit il doit licencier le salarié pour motif personnel ou économique selon la cause de la modification.
Comment réagir si l’employeur ne respecte pas ses obligations ?
Il existe plusieurs façons pour le salarié de reprocher à son employeur un manquement à ses obligations contractuelles.
Les droits individuels
La prise d’acte de la rupture
Le salarié a la faculté de prendre acte de la rupture de son contrat, compte tenu de l’attitude fautive de son employeur à son égard.
Cette décision du salarié est radicale car elle entraîne la cessation immédiate et irrévocable du contrat de travail.
Lorsque le Conseil de prud’hommes saisi par le salarié considère que les griefs invoqués par ce dernier sont fondés, la rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans pour autant que l’employeur soit tenu de délivrer une lettre de licenciement.
Le salarié pourra alors prétendre au paiement du préavis et des congés payés afférents, des indemnités légales de licenciement et des dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la perte injustifiée de son emploi.
Attention toutefois, car si les faits invoqués par le salarié au soutien de sa prise d’acte ne sont pas fondés, la rupture produit les effets d’une démission.
La résiliation judiciaire
Le salarié peut prendre l’initiative de saisir la juridiction prud’homale aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat sur le fondement des articles 1224 et suivants du Code civil.
Il doit cependant justifier d’éléments « suffisamment graves » à l’encontre de l’employeur interdisant la poursuite de la relation de travail, éléments qu’il appartiendra au juge d’apprécier.
Cette démarche présente un intérêt certain pour le salarié car durant l’instance en résiliation et jusqu’à la décision définitive, appel inclus, le travailleur poursuit son activité et perçoit sa rémunération.
Autrement dit, l’action en résiliation judiciaire ne suspend pas le contrat de travail et, à la différence de la prise d’acte, ne le rompt pas davantage.
Dès lors, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce.
Si la procédure du salarié aboutit, elle se traduit par les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à l’égard des salariés ordinaires et d’un licenciement nul pour violation du statut protecteur à l’égard des salariés protégés ou en cas de harcèlement moral.
Dans les deux hypothèses, le salarié peut prétendre aux indemnités correspondantes comme pour la prise d’acte.
Si la procédure du salarié n’aboutit pas, le contrat de travail se poursuit.
Le droit de retrait
Les salariés ont la possibilité de se retirer « d’une situation de travail dont ils ont un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé » (C. trav., art. L. 4131-3).
Le salarié peut donc refuser d’exécuter sa prestation de travail sans qu’aucune sanction puisse être prise à son encontre.
L’appréciation d’un « danger grave et imminent » relève du pouvoir souverain des juges du fond (ce qui peut caractériser un danger pour un salarié peut ne pas l’être pour un collègue).
L’exercice légitime de ce droit ne peut entraîner « aucune sanction ni aucune retenue de salaire » (C. trav., art. L. 4131-4). Est ainsi nul le licenciement d’un salarié qui a légitimement exercé son droit de retrait.
Les droits collectifs : la grève
Le droit de grève a valeur constitutionnelle. L’article L. 2511-1 du Code du travail apporte d’utiles précisions sans toutefois en définir précisément la notion.
Selon la jurisprudence, « l’exercice du droit de grève résulte objectivement d’un arrêt collectif et concerté du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles ».
La cessation de travail doit être franche, c’est-à-dire que les grèves perlées et du zèle ne sont en réalité pas des grèves.
Cette cessation doit être collective. Par principe, un salarié seul ne peut pas faire grève sauf lorsque lorsqu’un salarié obéit à un mot d’ordre de grève formulé au plan national (la défense du régime des retraites en est une parfaite illutation).
Enfin la grève doit appuyer des revendications professionnelles fussent-elles déraisonnables.
À la différence du droit de retrait, l’exercice du droit de grève entraîne la suspension du contrat de travail et donc l’absence de paiement du salaire par l’employeur.
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